«Quoi que vous réserve le présent, acceptez-le comme si vous l’aviez choisi. Allez toujours dans le même sens que lui, et non à contresens. Faites-vous-en un ami et un allié, et non un ennemi. Cela transformera miraculeusement toute votre vie.»
– Eckhart Tolle
Les colons anglais vivaient à Calcutta depuis un bon moment. Ils s’étaient relativement bien adaptés à leur nouvelle vie en Inde – certains s’étaient lancés en affaires et plusieurs avaient fondé une famille. Oui, on pourrait dire qu’ils s’étaient bien intégrés à leur nouvel environnement. Or, une chose leur manquait énormément : jouer au golf. Ils en parlaient souvent, et toujours avec une grande nostalgie. Après des mois de frustration, ils décidèrent donc d’aménager un terrain. Ainsi, ils pourraient renouer avec leur sport favori.
Dès qu’ils commencèrent à jouer, une fois le terrain terminé, ils rencontrèrent un gros problème. Ou plutôt, une foule de petits problèmes, sous la forme de jolis singes débordant d’énergie. Très courants en territoire indien, ils sautaient des arbres, attrapaient la balle et la lançaient dans la direction de leur choix! Jouer au golf était terriblement difficile, pour ne pas dire impossible, dans ces conditions. C’était à en devenir fou!
Les Anglais eurent donc une idée : ils allaient ériger des clôtures très hautes pour protéger le terrain. Le hic était que… Bien, on sait que grimper ne pose pas problème à nos amis les primates. Pas découragés du tout, les colons essayèrent ensuite d’attirer les singes à l’extérieur du terrain… Mais ces derniers n’avaient de toute évidence aucune intention de s’en aller; ils n’aimaient rien de plus que de voir les humains s’énerver quand leur petite balle blanche n’était pas là où elle était censée se trouver! Finalement, ils tentèrent d’enfermer les bêtes dans des cages et de les emmener à une centaine de kilomètres de là. Encore une fois, ils n’eurent aucun succès… Les singes étaient beaucoup trop nombreux.
Après un certain temps à essayer diverses tactiques à répétition, espérant que l’une d’entre elles finisse miraculeusement par fonctionner, les golfeurs finirent par capituler. Ils n’en pouvaient plus de se battre sans résultat et de se buter constamment contre le même mur – c’en était assez! Ils décidèrent donc de prendre les grands moyens et de créer une nouvelle règle assez novatrice, que voici : dorénavant, ils allaient frapper la balle à partir de l’endroit où le singe l’avait lancée. Rien de plus compliqué. Et c’est ainsi, chers amis, qu’ils se réconcilièrent avec leur sport préféré.
J’ai entendu quelqu’un raconter cette parabole, récemment (après avoir fait quelques recherches, j’ai appris qu’elle provient d’un livre intitulé Play the Ball Where the Monkey Drops It). Et en m’imprégnant de sa jolie conclusion – «jolie», bien sûr, si on oublie que les protagonistes étaient en train d’envahir un pays… –, je me disais que cette histoire est notre vie. Elle est la mienne, du moins, je peux vous en assurer.
Je ne sais pas pour vous, mais j’ai une vision très claire de comment les choses sont censées se dérouler. Voici les règles du jeu, selon Marie-Pier Charron : je fais tout ce qui est sous mon contrôle, exactement selon mon plan, puis j’obtiens ce que je veux dans les délais prévus, de la façon attendue. Voilà, c’est tout, le dossier est réglé! J’adore les lignes droites, je raffole de la rapidité – si la téléportation existait, c’est moi qui l’aurais inventée! –, et, dès que de petites poussières d’imprévus osent interférer, ma première réaction est de me rigidifier… De tenter d’éliminer le singe, si vous voulez – même quand c’est impossible, même si ça me rend folle, même si je n’ai absolument rien à y gagner.
Il y a une petite phrase magique qui me revient souvent en tête, et que je me répète comme un mantra, en de tels moments : «Je ne suis jamais en dehors de mon chemin». Oh, il y a une voix en moi, en nous, qui tente de nous convaincre que le «vrai chemin» est ailleurs, ou que la partie ne se déroule pas comme elle est censée se dérouler… mais une telle chose est impossible. Nous sommes toujours sur le vrai chemin, en plein cœur de notre vraie existence. Les «singes» – ces circonstances que l’on ne peut contrôler – ne sont pas des nuisances qui nous empêchent de vivre notre vie, ils sont notre vie, comme absolument tout ce que l’on rencontre. Ils font partie intégrante du jeu, et si on refuse de l’accepter – si on refuse de changer les règles pour inclure ces réalités –, on souffrira. On passera notre existence à être frustré, à avoir l’impression d’être au mauvais endroit, au mauvais moment, toujours à côté.
Bref, je pourrais continuer longtemps, mais je devine que je ne vous apprends rien, ici. C’est le genre de chose que l’on sait si bien, mais que l’on oublie malgré tout, et que l’on gagne simplement à se rappeler régulièrement. Considérez donc ce message comme un rappel… Une invitation à relaxer, à vous faire le cadeau de prendre la balle exactement là où les singes ont décidé de la lancer aujourd’hui. Ce serait génial s’il y avait d’autres options, bien sûr, mais il s’avère que c’est la seule façon de jouer. Et l’accepter est la seule façon d’avoir du plaisir tout au long de la partie. :-)
Bon lundi!
Marie-Pier
Matin Magique sur
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